LE VOYAGE (I)RRESPONSABLE :
Même si la dernière décennie a vu se propager le concept du voyage responsable et que la conscience collective prend peu à peu la mesure de l’importance d’un comportement écolo, certains voyageurs continuent a laisser bien plus que des traces de pas derrière eux. Plastiques, canettes et papiers gras ponctuent le trajet de ces touristes « tête en l’air » que l’état de la planète n’intéresse jamais autant que la perfection de leur bronzage. Jeep dans le désert, jet ski sur les plages turquoises du bout du monde, coups de palmes dans les coraux, la liste des comportements inconscients est longue, mais quand même pas aussi longue que celle de leurs conséquences.
L’excuse la plus répandue, le mot d’ordre du pollueur en vacances consiste à pointer du doigt l’attitude des locaux, a se cacher derrière les écarts du pays qui les accueille. En complément, il auto excusera en général son geste en l’accompagnant d’un « je fais ça, mais je sais que ce n’est pas bien » sans pour autant s’empêcher de balancer une bouteille, de jeter un papier. Les pays émergents ont l’excuse de l’ignorance. Quelle est la nôtre ?
Avantage : Difficile de trouver des bons côtés. Peut-être, simplement, qu’à force de prendre le soleil sur des plages couvertes de plastiques, de se promener dans des jungles jonchées de détritus les gens prendront conscience de la nécessité et de l’urgence d’une réaction et d’un changement radical de comportement.
LA VIE A L’HOTEL :
C’est toujours un peu pareil, quelques mètres carrés, un lit, des serviettes propres, une fenêtre sur la ville ou sur rien et souvent, accroché au mur, les coups de pinceaux maladroits d’un paysage surcoloré, d’une scène de chasse improbable, d’une aquarelle triste, moche et mal fichue. Les chambres d’hôtel se suivent et se ressemblent.
Riche, peut être que les choses changent et que l’on se délecte des sophistications savoureuses d’une chambre immense, d’un luxe délicat et étoilé. La catégorie moyenne qui n’offre que le confort nécessaire a une nuit de sommeil, une douche, quelques minutes de repos avant de se jeter dans les rues d’une ville inconnue, ne laisse finalement qu’un souvenir lassant, ou rien ne sort vraiment du lot, ou les lieux se ressemblent, se chevauchent et ne font que renforcer l’envie d’un chez soit, d’une volée d’escalier vers une porte a son nom, d’une étagère ou vider son sac, d’un canapé pour se laisser tomber, souffler, oublier un peu les hôtels du monde entier.
Avantage : la facilité de bouger, de partir d’un jour à l’autre et puis aussi, bien sûr, le plaisir tout simple d’un lit qui se fait tout seul, d’une salle de bain qui s’auto nettoie et de l’apparition quotidienne de petites bouteilles de shampoing, de gel douche au dessus du lavabo.
LA « ALWAYS COOL » ATTITUDE :
C’est peut être le soleil, la mer, le rire un peu niais des filles en Eres, le regard des mecs qui les déssapent mentalement ou le soupire des bières glacées qu’on décapsule, quoi qu’il en soit c’est souvent sur la plage, dans les effluves de crème solaire qu’on rencontre la « always cool attitude ».
Un phénomène fréquent et relativement basique qui nous met face a des comportements un peu mous, des sourires forcés, des extases démesurées pour des trucs bêtes. Alors, tout devient « trop cool », tout est « excellent » et « essentiel », on perd la mesure des choses dans une guimauve invariable qui ne supporte rien d’autre que des superlatifs.
Interdit aussi les coups de déprimes, le blues et les soucis. Même les catastrophes se retrouvent bouffées par le cool. Parce qu’il fait beau, parce que la mer est bleue, les mecs pas mal, les filles sur-bonnes alors rien n’est grave, rien ne compte… Ni les drames, ni le mal du pays, ni les petits traquas que le quotidien transporte. À l’excès, le cool devient despotique, le soleil se fait religion et on balaie, on efface très vite tout ce qui pourrait ternir le tableau.
La déprime interdite est exorsicée a coup de formules préfabriquées, chaque petit coup dur effacé en martelant des « détend toi c’est le vacances », « t’en fais pas il fait beau », « décrispe toi et fini ton Mai Tai ».
Avantage : bon c’est vite fatiguant de jouer les imbéciles heureux, de bouffer du riz trop cool, de se goinfrer de nouilles trop chouettes dans des endroits trop frais, mais c’est vrai qu’à force de trouver tout génial, tout extra et de s’interdire les coups de mous, de blues, on fini par relativiser et on en arrive même a se débarrasser définitivement de la grisaille, de la déprime qui s’abat parfois sur nous sans aucune raison. L’important étant, bien sûr, de ne pas perdre la mesure des choses.
LE COMPLEXE DU PARC A THEME :
Attitude de plus en plus fréquente : celle qui consiste à confondre un billet d’avion avec le ticket d’entrée d’un parc d’attractions. Comme ci, par magie, un tampon sur un passeport octroyait automatiquement tous les droits au voyageur détenteur du fameux sésame, excusant du même coup tous les comportements, les impolitesses et les excès. Muni de son « passe-droit », ce visiteur privilégié traversera le pays sans gène, persuadé même, par sa seule présence, d’avoir fait une bonne action.
Ce voyageur, décomplexé par la somme faramineuse, investie dans son aller-retour low cost, se sentira pousser des ailes, et pour le temps de son séjour, prendra à la lettre le vieil adage « faites comme chez vous ».
Ne voyant dans chaque habitant qu’un des nombreux représentants du comité d’accueil mis a sa disposition, il s’étonnera de ces gens, arrêtés dans la rue qui ne sauront pas lui fournir l’information qu’il attendait, ou pire, qui n’auront pas pris la peine d’apprendre sa langue avant son arrivée.
Bien sûr, il ne comprendra pas que le coût exorbitant de son voyage ne couvre pas toutes ses dépenses annexes et n’hésitera pas à faire la morale à ces pauvres vendeurs, ignorants, qui auront tenté de lui soutirer de l’argent… après quelques minutes de mises au point, il mettra fin a la discussion en assenant sa fameuse phrase fétiche: « déjà, on est gentil, on vient ».
Avantage : La possibilité de pouvoir offrir aux locaux, fatigués et exténués par ses « rois du pétrole » en carton, quelques minutes de répit en discutant avec un voyageur sympathique tout en leur permettant de constater le savoir-vivre et les bonnes manières de la plupart d’entre nous.
LE VOYAGEUR COCHEUR :
Bien qu’il n’existe pas de bonne et de mauvaise façon de voyager, que parcourir le monde est une activité assez libre qui permet a chacun de la pratiquer comme il le souhaite, on s’accorde en général à dire qu’un voyage est un mélange de découverte, d’aventure, d’apprentissage de soi et des autres. Voyager, c’est souvent aller vers une culture, se noyer dans une ambiance, dans un contexte différent que ce soit a deux cents ou a deux mille kilomètres de notre point de départ.
Voyager prend du temps et on a rarement l’impression, même après plusieurs mois sur place, d’avoir fait le tour d’une destination. L’idée la plus commune, une fois notre sac vissé sur notre dos, au terminal d’un aéroport, sur le banc d’une station de bus, est de se jurer qu’il faudra revenir.
Le « voyageur cocheur » obéit, lui, a une toute autre logique, un concept qui ferait de la terre une gigantesque partie de bingo ou il ne suffirait que de quelques heures derrière une frontière pour pouvoir rayer ce pays de la liste, pour n’avoir plus jamais a y revenir, plus jamais a y penser. Le cocheur ne visite pas, n’apprend pas, ne cherche pas a comprendre.
Le cocheur voyage comme on complétait nos albums Panini : en remplissant les vides, en évitant les doubles. Poussé par cette énergie fantastique, ce but magnifique qui consisterait, en l’espace d’une vie, à avoir mis un pied (parce qu’un seul suffit) dans chaque pays de la planète, d’avoir fait le tour des principales attractions pour pouvoir, en fin de course, regarder derrière lui et dire, en y croyant: le monde ? Ouais, je l’ai fait.
Car, là ou le voyageur classique déclarera avoir visiter un pays, le « cocheur » lui, se ventera de l’avoir fait. C’est la le secret de sa discipline : le cocheur « fait » les pays, les uns derrière les autres, sans jamais vraiment ressentir le besoin de regarder en arrière. Car le temps presse, car il faut, il en est sûr, noircir un maximum de pages dans son passeport en un minium de temps.
Avantage : Pendant que le cocheur, prend soin de faire le tour des principales attractions, de compléter sa « check list » on pourra, tranquillement s’aventurer sur des routes plus calmes, des endroits un peu reculés et profiter du calme d’un lieu qu’on est seul, ou presque à visiter.
Ticket to : Thaïlande Editions la Martinière – Gaspard Walter Chloé Villaume
9 Comments
Les 10 choses que j’aime moins en voyage (partie 1) – Ticket to
24 avril 2012 at 16 h 17 min[…] suite de cet article est publiée ici : partie 2 […]
Estelle
24 avril 2012 at 19 h 12 minPour moi c’est bien vrai, qu’à chaque voyage, je me dis que je reviendrais, juste pour découvrir le coin voisin… 🙂
Par contre pour l’hôtel, on tombe de temps en temps sur des perles, un petit coin caché tenu par des gens géniaux.
gaspard
25 avril 2012 at 6 h 11 minAh non, mais c’est sur, parfois tu tombes sur un truc charmant qui te fais, l’espace de quelques jours, te sentir pratiquement comme chez toi. Mais tout de même, au bout d’un moment, quand la vie à l’hôtel devient un quotidien et plus simplement un élément de tes vacances ou de tes voyages, une certaine lassitude s’installe. C’est à dire que pour dix hôtels moyens tu en trouves un vraiment bon.
Bruno
25 avril 2012 at 19 h 01 minSans cocher, j’aime bien bouger moi et changer. Ca ne m’empêche pas de me dire très souvent je reviendrais. Mais j’avoue qu’au moment de choisir je choisis autre chose. Exception faites de quelques destinations que j’appelle mes pays de coeur (le Vietnam et l’Indonésie).
PS : Tu as vraiment une bonne plume qui n’est pas sans me rappeler celle de Christopher le MediaReporter.
Aurélien
7 juillet 2012 at 15 h 28 minA l’inverse, l’hôtel j’apprécie à fond…
Pas de ménage, souvent synonyme de restaurant systématiquement
De vrais vacances quoi…
Après c’est sur que sur le long terme, on s’y sent surement un peu à l’étroit 🙁
Allemagne
28 octobre 2012 at 0 h 34 minPour la majorité des points je suis plus ou moins d’accord après ça dépend du type de vacances ou voyages que l’on choisit!
Camille - L'Oiseau Rose
20 mars 2013 at 11 h 14 minLe pire, dans le « cocheur », c’est que même quand il visite un pays, il faut qu’il coche toutes les attractions touristiques… C’est pour ça que je déteste les « circuits » tout préparés (entre autres…)
gaspard
27 avril 2013 at 11 h 40 minCertains oui, d’autres non. On peut aussi se contenter de partager des ambiances, l’atmosphère d’une destination sans en dévoiler tous les secrets. Même en ayant vu quelques photos avant le départ, pour le voyageur, le voyage reste à faire et tout est encore à vivre.
Après on peut aussi fermer les yeux avant de partir, rester loin des livres de voyage et de Google Image.
direct matelas
22 mai 2014 at 11 h 24 mincomplètement d’accord avec la partie sur l’hôtel. personnellement l’hôtel c’est sympa quelques jours mais je m’en lasse vite. je n’ai pas l’impression d’être « chez moi ». Mon lit me manque, ma couette me manque et que dire de mes oreillers en plume d’oie? en bref, ma chambre me manque!
Je préfère encore louer une maison, un appart’hotel ou dormir chez l’habitant (plus chaleureux!)
Merci pour l’article qui m’a fait rire 🙂
bonne journée